Je ne peux plus lire les commentaires hargneux, colériques, violents qu’on se lance à la gueule sur les réseaux sociaux, comme autant de munitions pour déstabiliser, atteindre, blesser. Comme autant d’insultes et d’injures qui n’aident en rien ce grand VIDE collectif qui nous habille de bienveillance ou d’indifférence. Selon l’esprit du moment. Selon l’annonce de l’instant.

Non, ta vérité n’est pas meilleure que la mienne et la mienne pas plus juste que la sienne.

Mais que nous sommes loin de l’esprit de Noël…

Parce que je suis fascinée par cet esprit des Fêtes qui revient chaque année par chez nous, avec ses sourires d’enfants aux joues rosées… Ces lumières scintillantes qui parfois frisent l’indécence… Ces odeurs de grands-mères dans nos cuisines, de p’tit vin joyeux dans nos yeux… Ces sourires coquins dans nos bureaux, nos écoles… aujourd’hui il s’est tu. SILENCE !

Mais que nous sommes loin de l’esprit de Noël…

Noël qui peut être le plus vicieux des amis lorsque tu es seul, malade ou simplement incapable de gâter ce petit bout de vie qui est le tien. Parce que quand le bonheur se calcule en sous et qu’il est aujourd’hui compté plutôt que conté, il peut devenir le plus triste des moments d’arrêt.

Mais que nous sommes loin de l’esprit de Noël…

Ce matin j’ai envie de le raconter, de retrouver sa magie. Que cet enfant soit né dans cette étable en ce froid matin de décembre, ou que ce ne soit pas le cas… Que certains y croient et d’autres non… Est-ce vraiment important? Et si la magie de Noël c’était de regarder ceux qu’on oublie de regarder! De donner au suivant… d’amorcer de réels changements, si petits soient-ils et de les continuer le reste de l’année… Si cet esprit magique qui règne dans nos maisons pouvait souffler, tel un vent du Nord colérique et parsemer les petits chemins de sourires et de rires… Et ce, même à distance… En cette année à oublier… Si nous pouvions, d’amour, contaminer…

Mais que nous sommes loin de l’esprit de Noël…

Si nous devenions, collectivement ce gros bonhomme rouge à barbe blanche et qu’ensemble nous offrions un tout petit peu de notre avoir et beaucoup de notre être et de notre temps…. Peut-être arriverions-nous à bâtir ce Noël à l’année! Cet esprit de partage et de joie que je sens monter en moi comme la sève en l’érable quand décembre revient.

Et si aujourd’hui nous posions ensemble cette première pierre, qui servirait à façonner un monde meilleur, plus équilibré, juste, équitable…. Et si c’était possible….Et si nous devenions ce bâtisseur de changement, ce maçon du bonheur, cet ouvrier au plus grand et plus noble des chantiers…..

Qui sait? À Noël, tout peut arriver…

Ah mon cher Père Noël,

Voici bien longtemps que je n’ai pris la plume pour t’écrire… Si longtemps que ma plume s’est envolée, remplacée par le clavier.

Les premiers flocons te précèdent… Les maisons se maquillent…. Et déjà les magasins fourmillent… Et pourtant cette année ton esprit est absent. On s’empoigne à pleine gueule, seuls, dans le plus grand des combats collectifs. On s’empoigne à pleine gueule, on en perd l’essentiel…

Tu connais, petit papa, mon malaise de Noël. Oh il n’est pas dirigé contre toi ce malaise, tu incarnes le pire comme le meilleur. Parfois tu es indécent, avec ton trop-plein d’abondance et ces cadeaux aux mille couleurs fabriqués par les petites mains de tes lutins loin loin là-bas… Pour quelques sous… Pour quelques sous…

Mais tu es aussi magnifique, quand tu déambules dans les couloirs d’hôpitaux, d’orphelinats, sur les coins de rues, avec ta horde usée pleine de cadeaux recyclés et à peine emballés, mais qui savent faire naître cette étoile au fond de l’œil de l’enfant.

Père Noël je fais appel à toi. Je ne souhaite ni festin, ni cadeaux, mais un peu de magie. Père Noël, mon Québec est malade. Il est devenu le ring d’insultes, d’égoïsme et de nombrilisme. Les coeurs sont asséchés.

Loin d’être une maladie orpheline, c’est plutôt une sorte d’épidémie ! Et tu sais, le pire n’est pas la maladie, mais la fuite de l’ESPOIR. Je me tourne à gauche et à droite et  il semble s’être envolé. Les bras sont lourds, les dos voutés… Difficile de rester digne, de maintenir le cap, quand l’horizon est si embuée… On cherche la direction….

Père Noël, la convalescence sera longue… Les effets secondaires puissants….

Mais juste de te l’écrire je me sens déjà mieux. Est-ce le pouvoir magique de ta féérie de Noël ou la résilience légendaire de l’humain. Alors j’abrège ma conclusion. Dans ton grand Nord, au fond là-bas, n’oublie pas de remettre l’espoir dans les souliers petits et grands….

L’humain est fascinant….

Dans ce qu’il est imparfait! De ses failles parfois si incisives et profondes que sombrer semble beau…. peut s’ériger la vie, la magie, la poésie.

De l’injustice cruelle d’un coin de  rue de l’ailleurs peut naître un moment de grâce au sourire de l’enfant.

Quand le décor devient propice au néant; alors s’allume l’instant. Celui-là même qui devient résilience. Quand le bond redéfinit la forme et que la bataille cesse à la Cour des « pourquois »…

Et c’est à ce moment, à ce moment seulement….

Entre le drame et la naissance, déshabillé de rage et gonflé de courage que l’humain se relève…. Et qu’il dépose une pierre à l’érection de cette étrange cathédrale…